La responsabilité du dirigeant dans le traitement des PV de ses salariés – Bilan d’un an de contestation

Après presque un an et demi de mise en place du système des contestations des PV de non-désignation, nous pouvons tirer un premier bilan.

La gestion des PV de véhicules de société pour le dirigeant est compliquée.

Les règles fondamentales pour le dirigeant de société, pour les infractions commises par ses salariés au volant de véhicules de sociétés sont rappelées ci dessous.

 

Sur des PV à la volée ou radar flash

Nous ne réfléchissons que dans le cadre du contentieux sans interpellation, le salarié interpellé est poursuivi comme  responsable, alors que le PV sans interpellation arrive auprès du dirigeant ès qualités en tant que titulaire de la carte grise.

La grande difficulté du titulaire de la carte grise, c’est son impossibilité à se défendre pour se désengager de sa responsabilité pécuniaire.

  • Il est contraint de payer l’amende en tant que redevable pour sauver les points du dirigeant non conducteur sans moyen de contestation.

L’article L. 121-3 fait peser une présomption simple, dès lors que l’on n’est pas dirigeant. Par contre, lorsqu’il s’agit d’une personne morale, il est maintenant établi que l’article L. 121-3 fait peser une présomption pratiquement irréfragable (Cass. Crim. 15 sept 2010, n°0987326).

Le seul moyen de ne pas payer l’amende civile du redevable en tant que représentant légal d’une société est de rapporter la preuve d’un cas de force majeure, c’est-à-dire une cause d’exonération absolument improbable et rarissime, ou  seconde option : il désigne le conducteur.

Donc, selon que l’on est un particulier ou que l’on est un professionnel, on n’est pas traité de la même manière devant les tribunaux de police en FRANCE.

C’est à noter.

Je parle là bien sûr de responsabilité civile pécuniaire et non pas de responsabilité pénale,puisque la mise en cause de la responsabilité pénale du dirigeant est écartée, dès lors qu’il y a pas d’identification du conducteur (article L121-1 du code de la route).

Nous sommes sur le contentieux de l’article L. 121-3 et non pas sur la responsabilité pénale du dirigeant qui serait auteur de l’infraction.

Le Pv de non-transmission un gouffre financier pour le dirigeant

L’autre problème auquel est confronté le dirigeant, c’est tout naturellement ce problème de non-désignation. Alors, qu’il reçoit un PV au nom de sa société, c’est à lui de le payer sur ses deniers personnels ou c’est à lui de dénoncer son salarié en cochant la case numéro 2.

S’il dénonce, le PV sera de nouveau édité au nom du salarié. Le salarié perdra ses points.

Nombreux chefs d’entreprise ne veulent pas faire perdre leurs points à leurs salariés.

Ils s’embarquent donc dans une contestation du PV. Ils cochent la case numéro 3 ; ils ne dénoncent personne et l’affaire est renvoyée devant le tribunal de police. Mais en parallèle, alors qu’ils n’ont dénoncé personne et qu’ils vont devoir payer l’amende sans possibilité de s’exonérer puisqu’ils ne se seront pas en mesure de prouver un cas de force majeure, eh bien, ils vont également recevoir en parallèle le PV de non-désignation.

La situation du dirigeant d’entreprise est donc extrêmement complexe. Pour notre part, nous la qualifierons de particulièrement injuste:

  • Soit il dénonce et il fait perdre des points à ses salariés qui ont donc un permis en danger alors qu’ils conduisent tous les jours, notamment pour les sociétés de chauffeurs-routiers,
  • soit ils se retrouvent à devoir payer une amende qui peut être majorée du fait des contestations et des poursuites en parallèle pour le PV de non-désignation.
La parade de Maitre FITOUSSI : contester , ne pas abandonner…

La réponse de notre cabinet a été de proposer une contestation des excès de vitesse à l’origine, c’est-à-dire qu’à réception de l’excès de vitesse, nous contestons la fiabilité du relevé de vitesse et nous demandons à ce que l’affaire soit portée devant le tribunal de police.

Sur le fondement de l’article L. 121-3, il est donc pratiquement impossible de faire annuler un PV sauf à revenir au contentieux habituel de la validité du relevé de vitesse (radar inopérant) ou nullité de forme du PV lieu imprécis difficile à établir ect..

Malheureusement, nous constatons que très souvent, les tribunaux de police écartent d’office ces contestations quand bien même il y aurait des nullités du fait d’un mauvais positionnement du radar ou d’un manquement d’identification du véhicule ou du lieu de commission de l’infraction et se placent sur une logique de requalification sur le fondement de l’article L. 121-3 sans vraiment débattre de la régularité formelle en nous faisant sentir « la grande faveur » qu’il accorde au dirigeant qui ne perdra pas de point…

Le dirigeant se retrouve donc en sortie du tribunal de police avec un PV de type amende civile sur ses deniers propres et en plus en parallèle la charge du PV de non-désignation qui lui est maintenant pratiquement inattaquable ( voir notre sur la jurisprudence de Décembre 2018).

La solution la plus sage semble donc de devoir revenir à une dénonciation, mais une parade peut être proposée à ce moment-là.

Nous proposons de désigner le conducteur et d’inviter ce même conducteur à contester lui-même le PV, c’est-à-dire que lui-même ne sera pas identifiable.

Dès lors :

  • il recevra le PV à son nom,
  • il demandera une contestation,
  • la contestation sera portée devant le tribunal de police où nous tenterons la nullité du Pv ou la preuve contraire au sens
  • il obtiendra la requalification sur le titulaire de la carte grise,
  • la personne morale sera de nouveau condamnée à payer sur le fondement de l’article L. 121-3 mais par contre, elle ne sera pas sanctionnée en parallèle de poursuites pour non-désignation.

Cette solution nous paraît la plus adaptée pour économiser à la société le contentieux du PV de non-désignation qui devient absolument ahurissant. Des oppositions administratives arrivent pour des montants de 1 875 € sans que même les amendes forfaitaires majorées soient émises.

Non aux commandements de payer illégaux à 1875 Euros !

Nous combattons à chaque stade de ce recouvrement abusif les pratiques du Trésor public, mais entre-temps, la trésorerie de la société en prend un coup et les clients sont, et ils ont bien raison, particulièrement dans l’inconfort, dès lors que des oppositions administratives viennent leur prélever 6 à 8 000 € pour des PV de non-désignation.

Ce système est d’une injustice incroyable. Le fondement est clair : il faut dénoncer les salariés, c’est ce que veut l’Etat ; il ne veut pas que les salariés soient déresponsabilisés de leur conduite au volant, mais ceux-ci se retrouvent pour le coup extrêmement exposés aux pertes de points.

D’une manière générale, nous ne lâchons pas nos sociétés dans le cadre des contestations. Il faut contester les PV qui paraissent irréguliers mais il ne faut pas engluer la société dans des amendes qui seraient trop élevées dès lors que l’on se retrouve devant le tribunal de police.

Avocat spécialiste du permis de conduire, Nous restons à l’entière disposition de nos clients sociétés pour mettre en place un système, un mode opératoire qui permettra d’éviter le contentieux du PV de non-désignation et de revenir à un contentieux classique de contestation du PV du salarié désigné et non identifiable au volant de son véhicule.