Article : Chronique Droit du permis de conduire dans le magazine judiciaire « intime-conviction » par Vanessa FITOUSSI.

Après le coup de théâtre « HADOPI » du fait de la censure du conseil constitutionnel, les légalistes du permis de conduire s’interrogent sur la légalité de la confiscation automatique du véhicule, la LOPPSI va-t-elle suivre le même sort que la Loi HADOPI ?

Le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, connue sous le nom de LOPPSI, présenté au Conseil des ministres le mercredi 27 mai 2009, n’a pas manqué de faire réagir le petit monde autorisé du droit de l’automobile exceptionnellement rassemblé autour de la volonté du gouvernement de s’en prendre, pour une fois, aux vrais délinquants routiers et non aux usagers quotidiens de la route qui commettent des petites infractions qu’ils payent souvent bien trop chers…

Ce projet propose l’instauration d’une peine complémentaire obligatoire de confiscation du véhicule du conducteur, s’il en est propriétaire dans le cas d’une conduite sans permis ou d’une conduite malgré une mesure d’interdiction de conduire. Cette peine complémentaire sera appliquée en cas de récidive d’une conduite sous empire de l’alcool ou de stupéfiants, d’un grand excès de vitesse (+ de 50km/h au dessus de la vitesse autorisée) ou de blessures et homicides involontaires à l’occasion de la conduite d’un véhicule.

Mais le juge ne pourra déroger à cette peine de plein droit que par une décision spécialement motivée. S’inspirant du dispositif de la « peine plancher », récemment instauré en droit pénal, le juge devra obligatoirement la prononcer ou à défaut motiver une décision l’excluant. Cette confiscation automatique du véhicule pose des problèmes pratiques et d’équité, est-ce la même sanction que de priver un chauffard alcoolique de sa Porsche vendue au profit de l’Etat ou un commercial de sa Renault Twingo, suite à une invalidation de son permis? Ainsi, demain Monsieur X viendra me voir pour contester devant le Tribunal Administratif une annulation de permis irrégulière suite à des amendes de son frère au volant de son véhicule de société, soit des avis de contravention qu’il n’ a jamais reçus, parce qu’il a déménagé après avoir divorcé, il sera arrêté pour conduite son permis après une livraison urgente demandée par son plus gros client en pleine nuit, il fera une garde à vue, comparaitra devant le Tribunal correctionnel qui prononcera automatiquement la confiscation de son véhicule et que pourrai-je plaider pour mon Monsieur X, si la loi l’impose de plein droit? Le dispositif de confiscation du véhicule existe déjà en droit pénal de la circulation routière, or le juge dispose de cet arsenal répressif mais ne l’applique que très rarement. Pourquoi alors imposer aux juges une sanction qu’ils décident souverainement de ne pas appliquer d’ores et déjà dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation du quantum de la peine ?

Les comportements dangereux au volant entraineront désormais des doubles, voir triples peines, des peines de prison, des annulations de permis, des amendes et des confiscations, si le tout répressif s’impose l’individualisation de la peine doit être préservée en contrepartie, c’est une garantie essentielle dans un Etat de droit !

Ces propositions nées de la LOOPSI heurtent, un principe général du droit fondamental, celui de l’indépendance du juge dans sa prise de décision et, en particulier, dans le quantum de la peine qu’il prononce. Peut-on encore parler d’indépendance lorsque l’autorité exécutive impose au juge l’obligation de prononcer une peine ?